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Football

À quoi sert vraiment le Ballon d'Or ?

Lionel Messi devant ses six Ballons d'Or durant la cérémonie du 2 décembre 2019 à Paris © FRANCK FIFE / AFP

Comme prévu, Lionel Messi a été élu Ballon d'Or 2019, devenant ainsi le joueur le plus récompensé de l'histoire. Mais comme chaque année, cette victoire fait énormément parler, et vient poser une question : à quoi sert une récompense individuelle dans un sport collectif ?

Il y a des machines qu'on relance en insérant une pièce. Et des débats qu'on relance en désignant un Ballon d'Or. Chaque année, tout le monde a son favori, un joueur qui le mérite plus que les autres pour son année exceptionnelle et/ou les titres gagnés, mais à la fin...

Depuis l'avénement de Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, qui à eux deux ont donc remporté 11 des 12 derniers Ballons d'or (!), le suspense n'est plus vraiment au rendez-vous, et chacun de leurs sacres est accompagné des mêmes remarques : doit-on désigner le meilleur joueur de l'année, ou le meilleur joueur du monde ? Est-ce qu'on récompense le talent, ou les statistiques ? Et ce n'est certainement pas le sixième Ballon d'or acquis par Messi (qui passe ainsi devant Ronaldo, qui n'en a "que" cinq) qui va venir calmer le jeu...

Barcelone - Argentine, le jour et la nuit

Lionel Messi est-il le meilleur joueur du monde ? Oui, sans aucun doute. Enfin, en attaque en tout cas. Parce que bon, pour mettre des petits ponts et marquer des superbes coup-francs, il y a du monde, mais pour le repli défensif et récupérer le ballon, tout de suite c'est plus compliqué que pour un Sadio Mané, hein. Mais avec ses statistiques incroyables en 2019 avec le Barça (41 buts et 17 passes décisives en... 44 matches), il confirme son statut d'extra-terrestre.

Seulement voilà, c'est un peu simple dans un championnat dont le suspense pour le titre se résume à "Barça ou Real cette année ?", dans un collectif qui joue pour lui, avec les penaltys et les coup-francs à disposition. Surtout quand on voit le naufrage qu'a été la Copa America pour l'Argentine, dont Messi est le capitaine... En dehors du Barça, est-il si fort que ça ? Une réponse à laquelle on n'aura probablement jamais de réponse. En tout cas, Twitter s'amuse bien à imaginer qu'il ne lui manque plus qu'un Ballon d'Or pour invoquer Shenron, le dragon de Dragon Ball Z.

Red is dead

À l'inverse, les joueurs de Liverpool ont eux peut-être trop brillé... collectivement. Ils sont sept à avoir terminé dans les 30 premiers du classement. Salah et Mané ont fini co-meilleurs buteurs de Premier League avec 22 buts (et sans penaltys), et durant une année 2019 qui aura vu les Reds ne concéder qu'une seule défaite en championnat (pour l'instant), et remporter la Ligue des Champions (après une incroyable remontada face à... Barcelone), la Supercoupe d'Europe, échouer à un point du titre d'un championnat qu'ils dominent actuellement de la tête et des épaules...

Le gardien de Liverpool Alisson Becker, qui a en plus remporté la Copa América avec le Brésil, savait en revanche à quoi s'attendre : il a gagné le premier trophée Yachine, sorte de Ballon d'Or pour les gardiens. Histoire de les préparer à ne plus jamais pouvoir poser les gants sur la principale récompense ? Dans ces conditions, pourquoi ne pas s'attendre à un trophée du meilleur défenseur, du meilleur arrière latéral ou du meilleur milieu défensif, puisque les journalistes du monde entier, qui votent pour désigner le Ballon d'Or, semblent avant tout obnubilés par les buts et l'image des joueurs ?

Pour beaucoup, la solidité défensive apportée par van Dijk à Liverpool a permis au club de redevenir un géant d'Europe, et il a au moins autant d'impact sur son équipe que Messi sur le Barça. Cela s'est joué à peu de choses : l'Argentin termine à 686 points, le Hollandais à 679. Un des classements les plus serrés de l'histoire. Le grand Virgil avait donc toutes les raisons d'y croire, et il n'est pas passé très loin. Peut-être avait-il trop de coéquipiers de Liverpool nommés à ses côtés, et que les votes pour récompenser le parcours de Liverpool se sont éparpillés en fonction des affinités de chaque votant...

L'illogique sportive

En 2010, l'Espagne de Xavi et Iniesta est championne du monde, l'Inter Milan de Sneidjer, également finalsite de la CDM, réalise un incroyable triplé, mais c'est Messi qui obtient le Ballon d'Or. En 2013, le Bayern Munich, porté par un fantastique Franck Ribéry, réalise également le triplé : c'est Cristiano Ronaldo qui est élu, après un étrange report des votes... En 2018, la France de Griezmann (qui remporte la Ligue Europa la même année) et Mbappé est championne du monde, mais c'est... Luka Modric qui est désigné.

Virgil van Dijk vient donc de vivre le même genre de frustration. Et apprendre qu'avec le Ballon d'Or, il ne suffit pas de briller collectivement. Il faut aussi avoir tous les projecteurs braqués sur soi, au détriment de ses partenaires. Un drôle de paradoxe pour un sport qui se joue à onze...

Mais il peut toujours se consoler avec la Ligue des Champions remportée. Et en pensant qu'à respectivement 34 et 32 ans, Cristiano Ronaldo et Lionel Messi ne devraient plus être dans le circuit trop longtemps...

Dans les coulisses, Mbappé, Sancho, de Jong et autres futurs prodiges se frottent déjà les mains, en espérant avoir eux aussi la chance de mettre un Ballon d'Or sur leur cheminée. Et rentrer dans la légende. Car voilà à quoi sert le Ballon d'Or. Laisser une trace dans l'histoire du football, et la marquer de son empreinte de crampons. Avec six trophées, il va désormais falloir s'attendre à entendre parler de Lionel Messi comme du meilleur joueur de tous les temps. L'est-il vraiment ? Ça non plus, on ne le saura sans doute jamais...

Sources : RMC Sport, France Football

Sébastien Delecroix
https://twitter.com/seb_o_matic Sébastien Delecroix Rédacteur