
Ligue des Champions : une révolution à venir ?
Comme ça faisait longtemps que la Ligue des Champions n’avait pas été réformée et qu’une équipe surprise comme l’Ajax d’Amsterdam se permet de taper le Real Madrid ou la Juventus Turin, une nouvelle version de la compétition aux allures de club VIP est à l’étude.
Tenue correcte exigée
Le projet, porté par Andrea Agnelli, président de la Juventus et d’autres dirigeants de grands clubs européens, vise à transformer la Ligue des Champions en une ligue presque fermée. Heureusement, pour l’instant, tout le monde n’est pas d’accord, loin de là. Et on comprend pourquoi : cette réforme signerait quasiment l’arrêt de mort des championnats nationaux.
Avant, le principe de la Ligue des Champions était simple : tu es champion de ton pays, bravo ! Tu pars en Ligue des Champions affronter les autres clubs européens champions dans leur pays respectif. C’est comme ça que l’OM pouvait perdre en finale contre l’Étoile Rouge de Belgrade, et les autres Coupes d’Europe garder de l’intérêt. Le Real est champion ? Barcelone sera donc en C2 ou C3. Manchester United est champion ? Liverpool, Arsenal et Chelsea seront dans les autres compétitions, cool. Mais non, ça, c’était trop simple. Il fallait plus de matchs, plus de grosses affiches. Alors depuis 1999, les vice-champions, mais aussi les troisièmes et quatrièmes des meilleurs championnats peuvent se joindre aux phases de poule en septembre. Pendant ce temps, les clubs champions d’Écosse, de Roumanie, de Bulgarie et cie débutent la compétition… en juillet. Quand les puissants sont encore en vacances, ou entament leur préparation… Le système ne semblait pourtant pas assez injuste. Alors une nouvelle solution a été avancée. Une ligue fermée dont le message semble être “tenue correcte exigée, et les pauvres, n’essayez même pas de rentrer”.
Quatre poules de huit
Le but premier, c’est de pouvoir faire plus d’argent. Pour ça, il faut plus de matchs. L’idée est donc de passer des huit groupes de quatre équipes actuels, à quatre groupes de huit équipes, avec toujours des affrontements en mode aller-retour.
Les clubs sont ainsi assurés de disputer au moins 14 matchs européens, au lieu de six aujourd’hui. Soit plus du double. Jackpot ! Les quatre premiers de chaque poule seraient ainsi qualifiés pour les huitièmes de finale… ainsi que pour la compétition de l’année prochaine ! Et tant qu’à faire, les cinquièmes, qui n’auraient pas le droit aux huitièmes de finale, auraient quand même le droit de revenir l’année d’après.
Pour les sixièmes et septièmes, ils devraient s’affronter durant les barrages, tandis que les huitièmes seraient eux relégués et remplacés par d’autres petits nouveaux prêts à servir de souffre-douleurs aux habitués de ce club très select. Car 24 des 32 clubs engagés seraient donc requalifiés. Et cela sans tenir compte des résultats nationaux. C’est-à-dire qu’une équipe comme le PSG, par exemple, pourrait envoyer ses U21 disputer les matchs de championnat et finir 13ème, peu importe, s’ils ont fini dans les cinq premières places de leur poule, ils seront de retour l’année d’après en Ligue des Champions. Qui ferait donc mieux de changer de nom, et s’appeler la Ligue des Riches.
La résistance s’organise
Mais tout le monde n’est pas d’accord avec cette proposition, envisagée pour être mise en place en 2024. Les fédérations anglaises, espagnoles, italiennes et allemandes ont déjà indiqué ne pas vouloir que la compétition européenne se joue les week-ends à partir des quarts de finale, comme le veut également la proposition.
En reléguant les championnats domestiques en semaine, les affluences, derrière les écrans ou dans les stades s’en ressentiraient fortement. Avec cette réforme, les grands clubs cherchent à se rapprocher de ce qui se fait en NBA : une ligue fermée avec de grosses affiches prestigieuses, où les stars du football s’affronteraient entre elles, et uniquement entre elles.
C’est un peu oublier l’essence de ce sport, basée sur la surprise, l’improvisation. Et également prendre le risque que les spectateurs se lassent. S’ils sont des dizaines de millions en Europe à guetter un choc comme Liverpool-Barcelone ou Real Madrid-Bayern Munich, c’est parce qu’ils sont rares, et donc par définition, exceptionnels. Cette Ligue des Riches ne pourrait que rendre banal ce qui est aujourd’hui exceptionnel. Mais pourrait en revanche donner envie aux spectateurs d’éteindre leur télévision, et de sortir pour taper dans un ballon…
