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Real-Barça : mais d'où vient cette rivalité ?

Messi et Ramos lors du match aller entre le Real Madrid et le FC Barcelone (0-0), le 18 décembre 2019 à Barcelone © LLUIS GENE / AFP

Ce sont les deux clubs les plus titrés d'Espagne. Le Real Madrid et le FC Barcelone. Les supporters des deux camps se détestent, les joueurs aussi. Mais cette animosité n'a pas que des origines sportives...

Dans les années 2010, le Clásico est devenu le match le plus regardé de la planète, grâce à (ou à cause de ?) l'opposition farouche entre le Barça de Pep Guardiola et Lionel Messi, et le Real Madrid de José Mourinho et Cristiano Ronaldo.

Les deux meilleurs entraîneurs de la planète, les deux meilleurs joueurs, le scénario idéal pour un spectacle total. Surtout qu'il y avait beaucoup de suspense, et de tension. Simulations en cascade, fautes grossières, agressions, et des buts, tout de même. Depuis, l'audience a baissé, sur les antennes asiatiques notamment, mais la rivalité demeure toujours. Car Madrilènes et Barcelonais n'avaient pas attendu Guardiola et Mourinho pour se détester. Capitale de l'Espagne, Madrid n'apprécie pas forcément les désirs d'indépendance de la Catalogne, dont Barcelone est le symbole. Géographiquement et socialement, déjà, même en foot, on ne part pas d'un très bon pied...

Real Madrid 11 - 1 FC Barcelone

Les deux clubs commencent à être au coude-à-coude avec la création de la Liga, le championnat espagnol que l'on connaît aujourd'hui, en 1928-29. Si ce sont les Basques de l'Atheltic Bilbao qui remportent les deux premiers championnats, le Real va obtenir le titre dès la saison 1931-32, et les Merengues comme les Culés vont commencer à accumuler les titres. Et puis, l'histoire, avec un petit h, va s'en mêler...

De 1934 à 1939, l'Espagne est ravagée par la guerre civile, durant laquelle Franco prend le pouvoir en 1937, et installe une dictature qui durera jusqu'à sa mort, en 1975. Durant le régime autoritaire, la Catalogne subit un traitement de choc, avec la perte de son autonomie, l'interdiction de parler en catalan en public, et des livres en catalan brûlés, tandis que beaucoup de penseurs ou écrivains s'exilent pour échapper à la prison, ou pire... C'est dans cette ambiance mortifère que se déroulent les demi-finales de la Coupe du Généralissime, redevenue depuis la Coupe du Roi...

Au match aller, en catalogne, le FC Barcelone s'impose 3-0. L'affaire semble pliée. Mais au retour, les Blaugranas subissent leur plus grande défaite à ce jour : 11-1 pour Madrid. Grosse méforme, empoisonnement, corruption de l'arbitre ? Encore pire que cela : intervention du pouvoir. Mis au courant du résultat du match aller, Franco, Madrilène de naissance et fervent supporter du Real, envoie son directeur de la sécurité glisser quelques mots aux joueurs barcelonais dans leur vestiaire, avant le match. Et pas franchement des mots doux, évidemment. Non là, on était plutôt sur des menaces bien concrètes faites aux joueurs et leurs familles, avec une petite phrase qui veut tout dire : "Vous jouez juste grâce à la générosité du régime". Ceci explique cela.

L'affaire du pénalty imaginaire

Un épisode douloureux que les supporters n'ont pas oublié, tout comme un pénalty imaginaire accordé en 1970 dans la même compétition, et toujours à Madrid. La faute, déjà pas évidente à la base, est clairement en dehors de la surface de réparation. Pourtant, l'arbitre, Emilio Guruceta, désigne le point de pénalty, permettant l'égalisation du Real Madrid à 1-1. Furieux, les Barcelonais s'énervent, sur le terrain comme en tribunes. Un joueur est expulsé pour avoir dit à l'arbitre qu'il était Madrilène. Les supporters lancent une bronca, et même leurs coussins sur la pelouse (parce que pourquoi pas), avant d'envahir le terrain. Le match est arrêté cinq minutes avant la fin, la victoire accordée au Real, et une amende donnée au Barça. Des années après, quand un arbitre prend une décision qui va à l'encontre d'un joueur, la légende dit que certains supporters crient encore "Guruceta, Guruceta"...

Simple erreur (comme il y en encore de nos jours, même avec la VAR), ou là encore, pression du pouvoir pour faire gagner le Real Madrid ? On ne le saura sans doute jamais, mais ces épisodes expliquent comment la haine entre les deux clubs a pu devenir aussi farouche, dans un contexte politique aussi brûlant.

Si les envies d'indépendance de la Catalogne dans les années 2010, couplées à la montée en puissance de l'une des meilleures équipes du FC Barcelone de l'histoire, ont fait monter la pression autour du Clásico à l'époque, on était tout de même bien loin du sombre épisode de ce 11-1... Et heureusement.

Real Madrid - FC Barcelone, un match décisif dans la course au titre, c'est ce soir à 20h55 sur beIN SPORTS 1, disponible depuis votre box SFR.

Sources : Real.Madrid-Barcelone.com, France Football, Tribuna

Sébastien Delecroix
https://twitter.com/seb_o_matic Sébastien Delecroix Rédacteur