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Acharnés : que signifient les titres des épisodes ?

Ali Wong dans le rôle d'Amy et Steven Yeun, l'interprète de Danny dans l'épisode 10 de la série Netflix Acharnés (Beef) © Andrew Cooper / Netflix

Si vous êtes un amateur de série et, qui plus est, un abonné fidèle de la plateforme au N rouge, vous avez sûrement dû entendre parler de sa nouvelle série originale Acharnés. Inspirée de faits réels, cette série est pleine de trouvailles, et ce jusque dans les titres des épisodes. SFR Actus les décrypte pour vous.

Acharnés est la nouvelle série originale Netflix du moment. Ayant directement intégré le Top 10 des séries du jour en France dès sa sortie, elle est actuellement à la 3ᵉ place du classement. Réalisée par Lee Sung-jin et le studio de production A24, notamment connu pour son film oscarisé Everything Everywhere All at Once, Acharnés regroupe un casting 5 étoiles avec Steven Yeun (The Walking Dead), Ali Wong (Always Be My Maybe), Ashley Park (Emily in Paris) et Justin H. Min (Umbrella Academy). La série est tirée d'un incident qu'a réellement vécu son réalisateur alors qu'il était au volant de sa voiture. À un feu rouge, le cinéaste s'est fait klaxonner et insulter, et il a décidé de se lancer à la poursuite de ce conducteur mal élevé... Fondamentalement basée sur l'expérience du réalisateur, la série Acharnés raconte l'histoire d'un accès de colère, celle de deux automobilistes au bout du rouleau qui vont se lancer dans une vendetta et laisser libre cours à leurs instincts les plus obscurs. La série met en avant divers thèmes comme la pression au travail, la dépression, ou la gestion de la colère, et elle le fait notamment à travers le nom de ses épisodes, qui sont loin d'être anodins...

Acharnés : les citations cachées derrière les noms des épisodes

On accorde généralement peu d'importance aux noms des épisodes d'une série. Pourtant, au travers de leurs intitulés, les dix épisodes d'Acharnés ont quelque chose à nous révéler. Le créateur et showrunner de la série, Lee Sung Jin, s'est inspiré de textes et de films connus du grand public pour imager les comportements déséquilibrés des personnages de la série. On vous décrypte les origines de ces citations, épisode par épisode.

1. Les oiseaux ne chantent pas, ils crient de douleur

Traduit de l'anglais The Birds Don’t Sing, They Screech in Pain, le nom du premier épisode, Les oiseaux ne chantent pas, ils crient de douleur, est tiré du documentaire Burden of Dreams de Werner Herzog. Dans ce documentaire, les oiseaux sont présentés comme des êtres calmes et ordinaires, avant qu'on ne se rende compte qu'ils cachent au plus profond d'eux une écrasante douleur... Il en va de même dans Acharnés pour Amy et Danny qui, de prime abord, semblent être deux personnes tout à fait ordinaires, alors qu'ils cachent sous la surface de sérieux problèmes.

"Les arbres sont dans la misère, et les oiseaux sont dans la misère. Je ne pense pas qu'ils chantent. Ils crient juste de douleur... En regardant de près ce qui nous entoure, il y a une sorte d'harmonie : C'est l'harmonie du meurtre collectif et bouleversant."

2. L'extase d'être vivant

C'est à l'écrivain américain Joseph Campbell que l'on doit le nom de ce deuxième épisode : L'extase d'être vivant (The Rapture of Being Alive en version originale). Lorsqu'on lui a demandé dans une interview ce que voulait dire "ressensir l'extase d'être vivant", l'écrivain a répondu par la citation suivante :

"Je ne pense pas que le sens de la vie soit ce que nous recherchons. Je pense que c'est l'expérience d'être vivant... pour que nos expériences de vie sur le plan purement physique aient des résonances avec notre être et notre réalité les plus profonds, pour que nous ressentions réellement l'extase d'être vivant". - Joseph Campbell

Une citation qui convient parfaitement à la suite des aventures d'Amy et Danny, qui, dans l'épisode 2, sont de plus en plus obsédés par leur vengeance. Une obsession qui leur permet d'agir en accord avec leurs pulsions et de ressentir l'extase d'être vivant.

3. Le cri qui m'habite

Le titre de l'épisode 3, I Am Inhabited by a Cry ou en bon français Le cri qui m'habite, est issu d'une citation du poème Elm de Sylvia Plath. Dans ce poème, Plath parle d'une noirceur en elle qui pleure désespérément la nuit à la recherche de l'amour. C'est également le cas de Danny et Amy dans Acharnés, qui pensent qu'une fois leurs objectifs de vie atteints, la noirceur en eux disparaitra.

"Le cri qui m'habite. Chaque nuit, il se déploie. Cherchant, avec ses crochets, quelque chose à aimer." - Sylvia Plath

4. Tout avoir, mais pas en même temps

Les fans d'Amy la perçoivent comme une femme qui a tout, néanmois, on le voit à Las Vegas lors de l'épisode 4, Amy a du mal à concilier son mariage, son rôle de mère, sa vie de femme et son épanouissement personnel et sa carrière. Le titre de l'épisode Tout avoir, mais pas en même temps (Just Not All at the Same Time en anglais) vient de la célèbre réponse qu'a donné l'auteure Betty Friedan quand on lui a demandé si les femmes pouvaient tout avoir.

"On peut tout avoir, mais pas tout en même temps." - Betty Friedan

5. Des créatures secrètes et égocentriques

Le titre de ce cinquième épisode, Des créatures secrètes et égocentriques traduit de l'anglais Such Inward Secret Creatures, est inspiré par une citation du roman La Mer, la Mer (The Sea, the Sea) d'Iris Murdoch. En effet, l'épisode 5 a pour but de mettre en lumière toutes les préoccupations égocentriques et superficielles qu'ont les personnages d'Acharnés, et à quel point ils sont obsédés par eux-mêmes et tentent de le cacher. C'est exactement ce que décrit cette citation d'Iris Murdoch :

"Nous sommes des créatures tellement secrètes que notre intériorité est la chose la plus étonnante en nous, plus étonnante encore que notre raison. Mais nous ne pouvons pas entrer dans la caverne et regarder autour de nous. La plupart des connaissances que nous pensons avoir sur notre esprit sont des pseudo-connaissances. Nous sommes tous des frimeurs, si doués pour gonfler l'importance de ce que nous pensons apprécier." - Iris Murdoch

6. On trace un cercle magique

Dans cet épisode 6, Amy est prise au piège dans le cercle vicieux de mensonges qu'elle a elle-même créés. Elle essaye par tous les moyens de se convaincre que la série d'événements malheureux qui s'enchainent depuis son accrochage en voiture n'est absolument pas sa faute. Le titre On trace un cercle magique (We Draw a Magic Circle) est extrait du film À travers le miroir (Through a Glass Darkly) d'Ingmar Bergman et essaye d'illustrer la construction d'une barrière autour de ce que l'on veut croire quand la vie commence à dévier du plan l'on a prévu.

"Nous traçons un cercle magique et excluons tout ce qui n'est pas conforme à nos jeux secrets. Chaque fois que la vie brise le cercle, les jeux deviennent gris et ridicules. Nous traçons alors un nouveau cercle et construisons une nouvelle défense." - Ingmar Bergman

7. Je suis une cage

Dans son ouvrage Die Zürauer Aphorismen, l'écrivain Franz Kafka décrit les humains comme étant des récipients, des vases vides, continuellement en quête de sens. C'est notamment le cas de Danny qui file directement à l'église après s'être laissé consumer par la dispute. Les deux personnages principaux sont à la recherche de sens.

"Je suis une cage à la recherche d'un oiseau." - Franz Kafka

8. Le drame du choix originel

Dans son livre Pour une morale de l'ambiguïté, Simone de Beauvoir nous expose le sentiment d'être pris au piège dans un effet domino où tous les choix que nous sommes amenés à faire sont conditionnés par notre passé et les différents environnements dans lesquels nous avons grandi. L'épisode 8, Le drame du choix originel (The Drama of Original Choice), nous plonge dans le passé de Danny et Amy et nous retrace, dans les grandes lignes, leur vie depuis leur naissance jusqu'à l'âge adulte. Ce flashback nous aide à comprendre à quel moment et pourquoi ces derniers sont enfermés dans leurs ténèbres.

"[...] Le drame du choix originel, c'est qu'il se déroule instant après instant pendant toute une vie, qu'il se produit sans raison, avant toute raison, que la liberté est là comme si elle n'était présente que sous la forme de la contingence.[...]" - Simone de Beauvoir

9. Le fabricateur d'illusions

"L'attachement est le grand fabricant d'illusions ; la réalité ne peut être obtenue que par quelqu'un de détaché." - Simone Weil

Le nom de cet avant-dernier épisode a été inspiré par Simone Weil. En effet, dans son ouvrage La Pesanteur et la Grâce, la philosophe française explique que pour prendre conscience de la réalité et l'accepter, il faut faire l'expérience d'une forme de perte. C'est d'ailleurs ce qu'il va se passer pour nos deux acharnés, qui vont respectivement perdre quelqu'un. Danny lorsqu'il demande à Paul de le quitter, et Amy lorsque George la quitte et part avec leur fille Junie. La perte de leurs proches les aidera peut-être à prendre conscience du chaos qu'ils ont créé autour d'eux...

10. Imaginer la lumière

Dans les Études alchimiques, volume 13, C.G. Jung souligne que pour aller de l'avant, il faut d'abord puiser dans ses ténèbres. L'ultime épisode de la série Acharnés, Imaginer la lumière, lance Amy et Danny dans la dernière ligne droite. Après s'être montré l'un à l'autre toutes les atrocités et méchancetés dont ils sont capables, les deux ennemis se retrouvent coincés ensemble dans le désert. Si la situation parait chaotique, ils sont pourtant rassurés de savoir que l'autre est également au bout du rouleau et qu'il est aussi mauvais qu'eux. Ce constat va permettre aux deux protagonistes de continuer à avancer dans la vie.

"On ne s'éclaire pas en imaginant des figures de lumière, mais en rendant l'obscurité consciente". - C.G. Jung

Acharnés véhicule un réel message sur l'élévation de soi et la gestion de nos émotions comme on peut le voir à travers les titres des épisodes qui collent tout à fait avec le scénario de chaque épisode. La nouvelle série à l'humoir noir de Netflix est d'ores et déjà disponible sur la plateforme.

Source : Tudum

Meyli Cousin
https://twitter.com/meycsn Meyli Cousin Rédactrice